H2S : Danger de l’hydrogène sulfuré

En 2016, un joggeur a perdu la vie après avoir couru sur une plage dans les Côtes d’Armor. Cette plage était recouverte d’algues vertes dont la décomposition est connue pour produire du H2S, gaz mortel à haute concentration. Le fléau des algues, couvert régulièrement par l’actualité (invasion des Sargasses), nous rappelle que H2S est un gaz dangereux pour la santé. Ce danger existe aussi en entreprise. Comme pour les autres produits chimiques dangereux, la présence de ce gaz nécessite une sensibilisation des professionnels aux dangers et l’employeur doit prendre des mesures préventives spécifiques pour lutter contre ce risque. Explications.

Définition et propriétés physiques et chimiques du gaz H2S

 Le sulfure d’hydrogène, de formule H2S et aussi appelé hydrogène sulfuré, est un gaz très toxique et très inflammable. Il est incolore et plus lourd que l’air (H2S a comme masse volumique de 1,36 kg/m³ contre 1,2 kg/m³ pour l’air). Il génère de mauvaises odeurs. On dit qu’il dégage une odeur d’œuf pourri, détectable lorsque sa concentration dans l’air est inférieure à 100 ppm* .

Attention : au-delà de cette concentration, H2S provoque une anesthésie olfactive, ce qui constitue un risque supplémentaire. On ne peut donc pas se fier à cette odeur pour savoir s’il y a un danger ou pas. 

On considère la valeur limite d’exposition à ce gaz à 10 ppm.

La classification CLP de H2S est la suivante : H220 – H330 – H400. Ainsi le sulfure d’hydrogène est extrêmement inflammable, mortel par inhalation et très toxique pour les organismes aquatiques.

(* à 25 °C et 101 kPa, 1 ppm de sulfure d’hydrogène correspond à 1,4 mg/m³)

Corrosion

Le gaz H2S est corrosif pour un grand nombre de matériaux : ciment, fer, cuivre. Il est même capable d’attaquer certains aciers inox.

Les équipements métalliques sont rapidement corrodés. Les tuyauteries en polyéthylène et en PVC offrent une meilleure résistance à ce gaz.

Comment se forme le gaz H2S ?

On trouve ce gaz dans un espace confiné acide (l’acidité se mesure via le pH du milieu) où il y a production de sulfure. Le sulfure d’hydrogène est formé lors de la décomposition, en l’absence de dioxygène, de substances organiques par des bactéries ou des champignons.

Il peut ainsi se former dans une fosse septique, une station d’épuration, les réseaux d’assainissement…Le milieu agricole est également concerné (présence de lisier).

La production de ce gaz est favorisée par une baisse de la pression atmosphérique ainsi que par la chaleur. 

H2S, un gaz mortel en cas d’inhalation. Quelques notions de toxicologie

Le sulfure d’hydrogène est absorbé par voie pulmonaire

Le sulfure d’hydrogène est absorbé par voie respiratoire et très peu par voie cutanée. Il induit une hypoxie cellulaire, soit un manque d’oxygène dans le sang. Il est éliminé par les reins et le tube digestif sous forme de thiosulfates, sulfites et sulfates.

Les signaux d’alerte : Quels sont les symptômes d’une intoxication ?

Une intoxication aiguë est provoquée par l’exposition très brève à une très grande quantité de H2S, tandis qu’une intoxication chronique est provoquée par l’exposition à des petites quantités de H2S très régulièrement (pendant quelques années minimum).

Les symptômes observables varient selon la concentration en H2S dans l’atmosphère. 

H2S : seuils de toxicité et valeurs limites d’exposition (ppm)

Concentration de H2S entre 10 et 300 ppm : intoxication légère

Une intoxication légère correspond à la présence de sulfure d’hydrogène entre 10 et 300 ppm. Elle provoque les symptômes suivants : kérato-conjonctivite (inflammation de la conjonctive et de la cornée), bronchite associée à des crachats sanguinolants, asthénies, céphalées, vertiges, troubles digestifs et neuropsychiques.

Important : selon le NIOSH, la valeur IDLH levels (Immediately Dangerous to Life and Health Concentration) est de 100 ppm (source : NIOSH).

Concentration de H2S entre 300 et 700 ppm : intoxication aiguë

Une intoxication aigüe, lorsque H2S inhalé est présent entre 300 et 700 ppm, provoque les symptômes suivants :

  • Polypnée (diminution du volume d’air inspiré et expiré conduisant à une hausse de la fréquence respiratoire),
  • Toux,
  • Céphalées,
  • Asthénie accompagnée de vomissements,
  • Œdème pulmonaire (passage de sang dans les poumons),
  • Coma si l’exposition au sulfure d’hydrogène est prolongée.

Concentration de H2S supérieure à 700 ppm : intoxication suraiguë

Une intoxication suraigüe, lorsque la concentration en H2S est supérieure à 700 ppm, provoque les symptômes suivants :

Perte subite de conscience, convulsion et dilatation pupillaire. Une personne exposée à ce niveau de concentration peut mourir très rapidement.

Intoxication chronique au sulfure d’hydrogène

L’existence d’une intoxication chronique au sulfure d’hydrogène est controversée, car les symptômes qu’elle peut provoquer (bronchite chronique, syndrome neurasthénique) pourraient être déclenchés par un autre facteur (coexposition à d’autres produits chimiques).

Explosivité du gaz H2S

Domaine d’explosivité de H2S

Le sulfure d’hydrogène rend l’atmosphère explosive lorsque son volume représente 4 % à 46 % de l’atmosphère.

Température d’auto-inflammation de H2S

L’auto-inflammation est possible lorsque la température est supérieure ou égale à 250 °C.

Protéger la santé des salariés : les mesures de prévention en entreprise

Matériel et EPI

  • Lors de la manipulation du sulfure d’hydrogène, il est nécessaire de prévoir des vêtements, des lunettes de protection et des gants adaptés.
  • Prévoir également des masques de protection respiratoire. Si la manipulation peut potentiellement dégager ce gaz, mettre en place une aspiration à la source d’émission.
  • Système de surveillance en continu de la qualité de l’air : Installer un détecteur de gaz (l’alarme sera calibrée sur 1 ppm, soit 10 % de la limite d’exposition à ce gaz) ainsi qu’une ventilation générale, en prenant en compte que le gaz est plus lourd que l’air donc se situe au niveau du sol.
  • A l’entrée des lieux de travail à risque, mettre en place un panneau ou une affiche pour signaler le danger.
  • Afin d’éliminer ce gaz toxique, il est possible d’effectuer un traitement des eaux usées en injectant des réactifs au niveau des postes de relevage.
  • Les locaux et la zone où se produit le sulfure d’hydrogène doit être ouverte, aérée, isolée de toute source d’ignition ou de chaleur, à l’écart des produits oxydants ou combustibles.

Mesures organisationnelles

  • Former les salariés et les personnes travaillant temporairement sur un lieu où un dégagement de H2S est possible.
  • Afficher à l’entrée de la zone le danger et les conditions d’accès
  • Rédiger une fiche de poste rappelant les consignes à appliquer et les mesures d’urgence.
  • Le travail se fait à 2 minimum. Chaque personne sera équipée d’un détecteur de gaz (alarme calibrée comme dit précédemment).
  • Un entretien régulier des cuves, fosses, égouts est nécessaire afin de supprimer les dépôts et résidus (ne pas utiliser de produits contenant de l’acide sulfurique)

 Suivi individuel médical et aptitude médicale

  • Informer le médecin du travail du risque d’exposition au sulfure du hydrogène.
  • Il est préférable d’éviter de mettre en contact des personnes présentant des affections neurologiques, oculaires ou respiratoires à un environnement contenant potentiellement du sulfure d’hydrogène. Une exploration fonctionnelle respiratoire ainsi qu’une radiographie du thorax sera éventuellement exigée par le médecin afin d’autoriser ou non le travail. 
  • Signaler au médecin du travail l’apparition des symptômes décrits précédemment 

Conduite à tenir en cas d’urgence

En cas de fuite de gaz ou déclenchement de l’alarme

  • Quitter la zone immédiatement 
  • Pulvériser un brouillard d’eau pour de réduire les vapeurs
  • Colmater la fuite
  • Si la fuite provient d’une bouteille et est impossible à arrêter, la sortir à l’air libre et laisser le gaz se répandre dans l’atmosphère
  • Empêcher la propagation du sulfure d’hydrogène vers les endroits où son accumulation peut être dangereuse, comme un caniveau ou des égouts.

En cas d’exposition au sulfure d’hydrogène (ou en cas de doute)

  • Evacuer le sujet de la zone en prenant soin que les sauveteurs et secouristes soient protégés et à l’abri de tout risque d’intoxication et d’explosion (ils doivent être munis d’équipement de protection individuelle) ; mettre le sujet en position latérale de sécurité si il est inconscient, puis le transférer dans un hôpital.
  • En cas d’inhalation de H2S à des concentrations dangereuses ou en cas de doute, contacter un médecin, le centre antipoison régional, les pompiers ou le SAMU.
  • Si l’œil est touché, laver et rincer à l’eau pendant 15 minutes. Consulter ensuite un ophtalmologue.

Sources bibliographiques

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